L’horloge de Simon et Véronique

Je me suis retrouvé dans le réfectoire d’une maison religieuse chrétienne. Je prenais le thé autour de 16 h. Mes yeux fixaient l’horloge élancée, en bois, dont le médaillon inscrivait la date de fabrication : 1883. Tout à coup, mes yeux virent au-dessus du médaillon une scène du chemin de croix. À droite, il s’agissait de Simon de Cyrène aidant Jésus à porter sa croix. J’essayais de comprendre le lien entre l’horloge qui tient les heures, son carillon, et cette scène de la Passion de Jésus. Je m’accrochai aux Écritures et me rappelai que Jésus a souvent évoqué l’Heure, son Heure. On lit : « mon Heure n’est pas encore venue », à Cana. Puis : « l’Heure viendra… », désignant dans l’histoire la destruction du Temple à Jérusalem en l’an 70. Enfin, au jardin des Oliviers : « vous n’avez pas eu la force de vivre cette Heure avec moi. »

L’Heure est le moment précis de l’avènement du présent dans l’Horloge de Jésus. Les secondes, les quarts, les demies, la totalité du temps, sont marqués désormais par le Fils de l’Homme venu en ce monde pour accomplir la Volonté du Père et nous être présents jusqu’à la fin des temps. On pourrait entendre : jusqu’à la fin des heures.

L’heure de Simon de Cyrène est aspirée dans l’Heure de Jésus à un moment précis de la Passion où la fatigue, causée par les nombreuses heures qui ont précédées, a rendu le condamné incapable de poursuivre seul sa marche. L’Heure de Jésus est librement acceptée et choisie mais non celle de Simon obligé de faire du temps pour un inconnu, au surcroît condamné à mort. Ce n’est pas une heure de Gloire!

Ma réflexion s’arrêtait là, mais le lendemain en regardant plus près, je vis à gauche un autre personnage de la Passion : Véronique et le linge qu’elle tient afin de mette un baume sur le visage tuméfié de Jésus. Ce geste, dans la tradition chrétienne, est un moment de compassion, très bref, mais qui en quelques secondes est un soulagement apporté au condamné respecté par Véronique qui semble savoir de qui Il s’agit.

De fait, Simon et Véronique sont deux mouvements, l’un imposé, l’autre non, qui s’inscrivent dans l’Heure de Jésus. Il le dit : « Je suis venu pour cette Heure! »

Et si dans nos heures à nous, il s’agissait de soutenir les souffrants dans leur passion quotidienne. Un geste, une parole, un regard, un peu d’eau, une attention. Tout cela deviendrait les aiguilles humaines en mouvement envers celles et ceux qui souffrent.

Nous risquerions de toucher Jésus puisqu’Il nous a révélé ceci : « j’étais malade, étranger, nu, prisonnier. »

Nos horloges, dans celle du Fils de l’homme, nous parlent du temps qu’il fait dans le profond climat de nos vies.

Denis Veilleux

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