Les Carêmes de Marie (3)

« Partir, c’est mourir un peu ». Ce n’est pas une Parole de la Bible mais une expression liée au départ d’un être cher comme un arrachement, pour un voyage, un changement de lieu, de travail, un temps de repos. Aujourd’hui, nous ne partons presque plus avec ces appareils qui voient nos destinations et nous suivent à la trace. Des gens se voient constamment dans le creux de leur main tout le long du trajet.

Dans les évangiles, nous n’avons pas explicitement un épisode qui nous met sur le seuil de la maison familiale de Marie à Nazareth au moment où Jésus quitte aux abords de la trentaine. Or, un événement est marquant. C’est l’arrivée de Jean au Jourdain qui attire les foules et donne un baptême de repentance. C’est le moment où Jésus se rend Lui aussi auprès du Baptiste au Jourdain. Sans doute que c’est avant son heure à Lui, mais c’est très certainement le déclic de son départ de Nazareth.

Il n’apparait pas non plus dans les évangiles que Marie se soit rendue au Jourdain. Elle continue sa vie à Nazareth. Quel est donc ce Carême? Celui de l’absence de son fils qui semble correspondre à la mission de leur parent Jean le Baptiste, fils de Zacharie et d’Élizabeth. Une parenté de mission car c’est Élizabeth qui a reconnu 30 ans plus tôt que la visitation de sa parente était hors du commun. « Comment m’est-il donné que la Mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi? » seront ses paroles adressées à Marie. Et cette joie du tressaillement de son enfant en elle qui la surprend.

Le Carême de Marie à Nazareth sera aussi toutes ces questions du voisinage sur le départ de son fils et des indiscrétions.

Le Carême de Marie est celle de la Mère, qui tout en restant à la maison, part avec son fils. Elle le suit intérieurement dans son déplacement comme font toutes les mamans lorsque les enfants quittent le nid familial. Et comme son cœur est modelé par les Paroles méditées comme les événements, il ne fait pas de doute que les propos du vieillard Syméon viennent à son esprit : « Il sera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël, et toi, un glaive transpercera ton cœur! ». Elle pressent qu’Il est parti pour ne plus revenir de façon permanente. Sa prière l’accompagne sans qu’elle ne sache où il se trouve de jour en jour. Ce seront de longues séquences où ils ne se verront pas. Et lorsqu’Il commencera ses prédications, elle entendra les rumeurs, les oppositions, les jalousies, les premiers ricanements, là même où elle vit à Nazareth.

Le Carême de Marie est d’entendre tout cela sans riposte. Le silence est son rempart.

Denis Veilleux

Partager cette page

© 2022 Radio Galilée | Constella - Agence créative